Peu de gens savent qu’un protestant francophone a dirigé les destinées du Québec à majorité catholique de 1878 à 1879.
Né à Épernay en France le 5 décembre 1829 d’un père protestant et d’une mère catholique, Henri-Gustave reçoit une éducation protestante ainsi qu’une formation académique rigoureuse. Après avoir reçu son diplôme de bachelier ès lettres à la Sorbonne, il est admis au Barreau du Bas-Canada en 1855. L’année suivante, il épouse Margaretta Josepha Gowen, la fille d’un notaire éminent de Québec, ce qui lui permet de s’intégrer à la haute bourgeoisie de la ville.
Élu député de Lotbinière en 1867, à l’Assemblée législative provinciale ainsi qu’à la Chambre des Communes fédérale, il connaîtra une carrière politique remarquable où jamais il n’acceptera de compromis sur son intégrité, préférant plutôt démissionner. Un parcours exemplaire pour le premier chef du Parti libéral du Québec que l’on considère également comme son fondateur. Réformateur avant l’heure, il est partisan de la séparation de l’Église et de l’État comme le préconise l’idéologie libérale, mais il rencontre toutefois une opposition farouche du clergé. Il est un promoteur acharné du progrès industriel et de saines finances publiques.
Il devient premier ministre du Québec le 2 mars 1878 à la tête d’un gouvernement minoritaire qui ne durera qu’un peu plus d’un an. Doté d’une grande ouverture d’esprit, il avait la capacité de chevaucher la dualité linguistique et religieuse canadienne en favorisant la compréhension, le rapprochement et la tolérance envers les minorités. C’est ainsi qu’il se fait porte-parole de la minorité anglophone du Québec et ce qui l’amène à accepter le poste de lieutenant-gouverneur francophone d’une province entièrement anglophone, la Colombie-Britannique.
En plus de son implication politique, Henri-Gustave est considéré comme le père de l’arboriculture au pays et fut un environnementaliste avant l’heure, alors qu’il dénonçait avec vigueur le pillage éhonté des terres publiques et appelait l’état à légiférer pour protéger les forêts pour le bénéfice des générations futures. Il s’intéresse passionnément aux sciences naturelles et à la conservation, à l’aménagement et à la préservation des espaces naturels et des ressources forestières.
Fait conseiller de la Reine en 1878, il sera cofondateur, en 1880, du journal L’Électeur de Québec, qui deviendra plus tard le journal Le Soleil. Il est également nommé chevalier de l’Ordre de Saint-Michel et Saint-Georges « Sir Joly de Lotbinière » en 1895. Il décède à Québec, en 1908, à l’âge de 78 ans.
Si jamais vous passez par la Rive-Sud de Québec, profitez-en pour visiter le domaine Joly-De Lotbinière, à un peu moins d’une heure de la capitale en bordure du fleuve. Non seulement, vous pourrez y admirer 11 jardins thématiques et une ancienne forêt domaniale, mais vous en découvrirez davantage sur la vie de ce personnage hors du commun au travers des expositions offertes dans sa maison d’époque bien conservée.